Pourquoi les simulateurs d’indemnisation sont trompeurs
Vous venez d’être victime d’un accident et vous vous demandez combien vous allez toucher. En quelques clics, des sites vous proposent un simulateur d’indemnisation du dommage corporel. Résultat immédiat : une estimation, souvent très précise, parfois même avec un graphique.
Mais ce chiffre est une illusion dangereuse.
Ces simulateurs d'indemnisation, qui prétendent estimer vos préjudices (souffrances endurées, déficit fonctionnel, perte de revenus, préjudice professionnel, besoin d’aide humaine, etc.), ne tiennent pas compte de la réalité juridique, médicale et humaine de votre situation. Ils sont, au mieux, des outils de vulgarisation, au pire, un moyen de minimiser vos droits.
Une indemnisation ne se résume pas à une formule mathématique
En droit français, le principe fondamental est celui de la réparation intégrale du dommage corporel. Cela signifie que tous les préjudices subis par la victime doivent être indemnisés, sans perte ni profit.
Selon la formule consacrée par la Cour de Cassation, il s'agit de rétablir aussi exactement que possible l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation dans laquelle elle se serait trouvée si l'acte dommageable n'avait pas eu lieu, sans perte ni profit.
Or, cette indemnisation dépend :
- De l’évaluation médicale du dommage (consolidation, taux d’AIPP, etc.) ;
- Du contexte personnel, professionnel et familial de la victime ;
- De la jurisprudence locale et de la stratégie de négociation.
Un simulateur ne prend aucun de ces éléments en compte. Il applique des barèmes standards, souvent ceux utilisés par les assureurs eux-mêmes, dans un objectif… d’économie.
Barèmes d’indemnisation : outils ou pièges ?
Il est vrai que certains barèmes qui sont d'ailleurs plutôt des référentiels sont utilisés comme référence :
- Le barème de la Gazette du Palais ou celui des cours d’appel (notamment Paris) ;
- Les fiches méthodologiques du référentiel Mornet ;
- Le référentiel IRCA (Indemnisation des Risques Corporels Automobiles) de certaines compagnies ;
- Les bases de données jurisprudentielles privées (Dalloz, Lamy, LexisNexis, etc.).
Mais attention : ces barèmes n’ont aucune valeur obligatoire. Le juge, selon l’article 1382 du Code civil (devenu art. 1240), statue en équité et au cas par cas. La nomenclature Dintilhac elle-même, bien qu’unificatrice, n’impose aucune grille chiffrée.
La Cour de cassation n'hésite d'ailleurs pas a censurer les juges du fond qui ont statué sur l'indemnisation d'une victime par référence à tel ou tel barème ou référentiel.
Un simulateur ne fait que figer votre dossier dans un modèle abstrait, sans prendre en compte vos besoins concrets (aménagement du domicile, assistance tierce personne, perte de chance professionnelle…).
Ce que les simulateurs ne vous diront jamais
Un accident de la route, médical ou de la vie ne se résume pas à un taux de DFT ou à une note.
Voici ce qu’un simulateur ignore systématiquement :
- La souffrance morale liée à la perte d’autonomie ou d’emploi ;
- La spécificité de votre métier (travail physique, de nuit, etc.) dans l’indemnisation du préjudice professionnel ;
- La durée effective du déficit fonctionnel temporaire ;
- Le reste à charge après remboursement par la Sécurité sociale et la mutuelle ;
- Les besoins réels d’aide humaine (aide familiale, auxiliaire de vie) ;
- Les frais divers (véhicule adapté, logement, assistance administrative…).
Un avocat, en collaboration avec un médecin conseil de victime, vous aide à documenter chaque poste de préjudice pour obtenir une indemnisation complète.
Pourquoi les simulateurs sont utilisés par les assurances
De nombreux simulateurs d'indemnisation sont proposés par des acteurs liés de près ou de loin aux compagnies d’assurance. Leur objectif est clair :
- Fixer un plafond psychologique dans l’esprit de la victime ;
- Décourager le recours à un avocat ;
- Encourager une acceptation rapide d’une offre amiable sous-évaluée ;
- Standardiser le préjudice, alors qu’il doit être individualisé dans l'intérêt des victimes.
Le Conseil national des barreaux rappelle que seuls les avocats sont habilités à délivrer un conseil juridique rémunéré. Toute autre structure (plateforme, société privée) qui le ferait tomberait sous le coup de la qualification délictuelle d’exercice illégal de la profession d’avocat (Cass. 1re civ., 25 janv. 2017, n° 15-26.353).
Une vraie indemnisation passe par un avocat
L’indemnisation se fait en plusieurs étapes que le simulateur ignore totalement :
- L’expertise médicale contradictoire, indispensable pour faire valoir vos droits.
- La phase amiable, durant laquelle l’assurance doit proposer une offre chiffrée (loi Badinter, art. L. 211-9 C. assur.).
- La phase contentieuse, en cas d’offre manifestement insuffisante et d'échec de la négociation.
- La négociation poste par poste, à l’aide de la jurisprudence, de pièces justificatives, des expertises et rapports.
Un avocat en réparation du dommage corporel connaît la jurisprudence, les arguments des assureurs, et défend vos intérêts spécifiques, pas une moyenne statistique.
En conclusion : ne laissez pas un algorithme décider de votre vie
Votre indemnisation doit refléter la réalité de vos souffrances, de vos pertes et de vos besoins. Elle ne peut se résumer à un chiffre généré par un outil automatisé. Vous n’êtes pas un cas statistique.
Si vous êtes victime d’un accident, ne vous contentez pas d’un simulateur. Faites appel à un avocat compétent en dommage corporel, formé à l’expertise victime, au droit de la responsabilité et aux litiges d’accidents de la route.
L'expérience enseigne que dans la très très grande majorité des cas, l'impact sur le montant de l'indemnisation est largement supérieur aux honoraires d'avocat acquittés
Contactez le cabinet de Maître Joris Caunes, avocat au barreau de Paris, pour une étude personnalisée de votre situation. La première consultation est gratuite pour les victimes d’accident corporel.