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Souffrances endurées (pretium doloris) : comment sont-elles calculées et indemnisées ?

Les souffrances endurées, anciennement appelées pretium doloris (le prix de la douleur), constituent un poste essentiel du préjudice corporel temporaire dans le cadre de la réparation intégrale du dommage subi par une victime.

Cet article explique comment est évalué le poste de souffrances endurées, comment se calcule le pretium doloris, et quelles démarches permettent d’obtenir une indemnisation complète avec l’aide d’un avocat en droit du dommage corporel.

Qu’est-ce que les souffrances endurées (pretium doloris) ?

Le pretium doloris est un poste de préjudice extra-patrimonial temporaire destiné à indemniser la douleur physique et morale ressentie par une victime entre le jour de l’accident ou de l’agression et la consolidation de l’état de santé, c’est-à-dire la stabilisation médicale du patient.

Elles ne concernent donc que la période ANTÉRIEURE à la consolidation. Il s’agit donc d’un préjudice limité dans le temps, visant à réparer les souffrances vécues pendant la période de soins, d’hospitalisation, de convalescence ou de rééducation.  C'est précisément pour cette raison que les souffrances endurées se distinguent du déficit fonctionnel permanent, qui relève, lui, des séquelles définitives.

Depuis un arrêt rendu par la 2ème chambre civile de la Cour de cassation en date du 5 janvier 1994 (n°92-12.185) les souffrances endurées peuvent inclure à la fois :

• des douleurs physiques (liées aux blessures, opérations, hospitalisations, soins invasifs, rééducation) ;

• des souffrances psychologiques (angoisse, anxiété, perte d’autonomie, peur du handicap, isolement).

Dès lors, les souffrances physiques et psychiques forment un préjudice temporaire unique, il ne peuvent donc faire l'objet de deux indemnisations distinctes (Cass. 2ème civ.; 16 septembre 2010, n°09-69.433).

Finalement, le pretium doloris traduit uniquement la pénibilité vécue avant la stabilisation de l’état de la victime.

L’évaluation médicale du poste de préjudice “souffrances endurées”

Il existe deux types d'outils permettant de procéder à l'évaluation des souffrances : la description détaillée / les barèmes. 

- La description détaillée 

La description détaillée consiste à évaluer les souffrances d’une personne à partir d’une analyse qualitative et narrative de sa situation.

L’expert décrit de manière précise et circonstanciée les douleurs physiques, les troubles psychologiques et les conséquences sur la vie quotidienne de la victime.

L’objectif est de restituer la réalité vécue par la personne :

  • Nature et intensité des douleurs (physiques et psychiques)
  • Évolution dans le temps (pendant les soins, la convalescence, et après)
  • Retentissement sur la vie personnelle, familiale, sociale et professionnelle
  • Degré de souffrance morale (angoisse, perte d’autonomie, altération de l’image de soi, etc.)

- Les barèmes 

Le médecin expert étudie l’ensemble des pièces médicales, interroge la victime sur ses douleurs et la durée de ses traitements, et évalue les souffrances endurées par le blessé sur une échelle à sept dégré : 

1/7 très léger 
2/7 léger 
3/7 modéré 
4/7 moyen
5/7 assez important 
6/7 important
7/7 très important
Exceptionnel 

(Référentiel Mornet 2024

L'indemnisation des souffrances endurées

Plusieurs référentiels indicatifs indiquent des tranches d'indemnisation associées à chaque cotation. 

Le référentiel Mornet propose le tableau suivant : 

1/7 très léger jusqu’à 2.000 €
2/7 léger 2.000 à 4.000 €
3/7 modéré 4.000 à 8.000 €
4/7 moyen 8.000 à 20.000 €
5/7 assez important 20.000 à 35.000 €
6/7 important 35.000 à 50.000 €
7/7 très important 50.000 à 80.000 €
Exceptionnel 80.000 € et plus

(Référentiel Mornet 2024

L'objectif est de garantir une uniformité des montants d'indemnisation versés aux victimes, afin de prévenir des écarts trop importants pour des souffrances comparables.

Pour autant, le montant de l’indemnisation dépend :

• du niveau de gravité attribué (de 1 à 7) ;

• de la jurisprudence locale (référentiel de la Cour d’appel compétente et jurisprudence de chaque juridiction) ;

• et de la durée et de l’intensité de la période de souffrance avant consolidation.

En règle générale, le juge s'appuie sur l'évaluation proposée par l'expert pour déterminer le montant de l'indemnisation. Toutefois, cette appréciation n'a pas de caractère contraignant : le juge conserve toute liberté pour modifier la cotation, notamment à la lumière de la description détaillée qui accompagne l'expertise.

De plus, lors de la phase de liquidation du préjudice, les parties conservent la possibilité de contester l'évaluation retenue par l'expert. En effet, l' évaluation médicale permet à l’avocat de fixer le montant de la demande d’indemnisation correspondant au poste « souffrances endurées » et, le cas échéant, de contester toute proposition d’indemnisation insuffisante.

Exemples concrets d’indemnisation

1/7- Femme de 46 ans victime d'un accident médical lié à la défaillance d'une prothèse dentaire, fêlures et cassures de celle-ci après la pose.  Indemnisation =  2.000€ (CA Lyon, 18 février 2021, n°18/0548)

2/7 - Homme de 50 ans victime d'un accident du travail, blessures au pouce, à l'épaule et aux cervicales en essayant de se rattraper. Indemnisation =  4.000€ (CA Lyon, 17 mai 2022, n°18/03300

3/7 - Homme de 76 ans victime d'un accident de la circulation, traumatisme crânien grave, hémorragie cérébrale, douleurs du rachis. Indemnisation =  8.000€ (CA Toulouse, 22 septembre 2020, n°19/03378)

4/7 - Homme de 39 ans victime d'un accident du travail, fracture ouverte des deux os de la jamnbe droite, le délabrement des os du pied droit et une avulsion de l'extenseur propre de l'hallux. Indemnisation = 12.000€ (CA Aix-en-Provence, 22 octobre 2020, n°19/07218

5/7 - Homme de 28 ans victime d'un accident de la circulation, amputation au tiers supérieur de la jambe gauche, traumatisme crânien, traumatisme thoracique, fracture ouverte de l'avant bras fauche, plaies profondes du bras droit, du mollet droit, et du poignet gauche avec section tendineuse, d'une fracture fermée du fémeur gauche. Indemnisation = 30.000€ (CA, Amiens, 5 mars 2020, n°19/05032

6/7 - Homme de 20 ans, victime d'un accident du travail, amputation du bras gauche, brîulures au niveau de la main droite. Indemnisation = 50.000€ (CA Grenoble, 16 mars 2021, n°18/02924

7/7 - Femme de 27 ans, victime d'un accident médical fautif (faute d'information et fautes techniques au cours d'un accouchement) , collapsus cardiovasculaire ayant causé uen atteinte neurologique sévère de type coma Vigile. Indemnisation = 80.000€ (CA Agen, 27 novembre 2019, n°17/00283

Les autres postes de préjudice à distinguer du pretium doloris

Le pretium doloris est un poste de préjudice autonome, répertorié dans la nomenclature Dintilhac, qui distingue les différentes composantes du dommage corporel.

Voici les principaux postes à ne pas confondre avec les souffrances endurées :

Déficit fonctionnel temporaire (DFT) : incapacité à accomplir les actes de la vie courante avant consolidation ;

Déficit fonctionnel permanent (DFP) : séquelles définitives après consolidation (distinct du pretium doloris) ;

Préjudice moral : détresse morale durable, douleur morale liée à un deuil ou à une atteinte psychologique prolongée ;

Préjudice esthétique temporaire : altération temporaire de l’apparence (bandages, cicatrices provisoires, etc.) ;

Préjudice d’agrément temporaire : impossibilité provisoire de pratiquer une activité de loisir ;

Préjudice économique temporaire : pertes de revenus liées à l’incapacité de travailler pendant la période de soins.

Ces distinctions permettent d’éviter toute confusion entre les souffrances endurées (avant consolidation) et les autres postes de préjudice temporaires ou permanent.

Étapes de la procédure d’indemnisation des souffrances endurées

1. Constitution du dossier

La victime doit réunir :

• les certificats médicaux et comptes rendus d’hospitalisation,

• les ordonnances, factures et justificatifs de soins,

• les preuves de la rééducation ou des traitements reçus.

2. Expertise médicale

Une expertise est organisée, soit amiablement, soit judiciairement.

L’avocat peut mandater un médecin-conseil de victime afin de défendre les intérêts de la victime et de contester les conclusions de l’expert de l’assureur.

3. Négociation ou saisine du tribunal

L’avocat en droit du dommage corporel négocie directement avec l’assurance ou saisit le tribunal judiciaire, la CIVI (en cas d’infraction) ou l’ONIAM (en cas d’erreur médicale).

4. Décision et versement de l’indemnisation

Le juge fixe le montant de chaque poste de préjudice (souffrances endurées, déficit temporaire, préjudice esthétique, etc.) et ordonne le paiement à la victime.

Recours possibles en cas de désaccord

En cas de désaccord sur l’évaluation des souffrances ou sur la proposition d’indemnisation, la victime peut :

• demander une contre-expertise médicale ;

refuser une proposition amiable jugée insuffisante ;

saisir le tribunal judiciaire pour réévaluation du montant ;

• ou saisir la CIVI ou l’ONIAM selon la nature du dommage.

L’accompagnement d’un avocat spécialisé est fortement recommandé pour défendre les intérêts de la victime à chaque étape.

En conclusion

Les souffrances endurées traduisent la douleur physique et psychique vécue par une victime pendant la période de soins, avant la stabilisation de son état.

Elles constituent un poste d’indemnisation autonome, essentiel à la reconnaissance de la réalité humaine du traumatisme subi.

Faire appel à un avocat en indemnisation du dommage corporel permet :

• d’obtenir une évaluation médicale rigoureuse,

• de valoriser au mieux le niveau de souffrance endurée,

• et d’assurer une réparation complète et équitable du préjudice.

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