Les accidents de la route impliquant un piéton renversé par une voiture soulèvent de nombreuses questions juridiques. Ce type de situation est encadré par un régime spécifique grâce à la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, dite loi Badinter, qui a pour objectif de faciliter l'indemnisation des victimes d'accidents de la circulation.
La question de l’indemnisation de la victime piéton renversée par une voiture s’apprécie en fonction des circonstances de l'accident de la route et des responsabilités en présence.
Cet article explore les droits des piétons victimes, les obligations des conducteurs et les règles spécifiques d'indemnisation.
1. Les principes généraux de la loi Badinter
La loi du 5 juillet 1985 vise à protéger les victimes d'accidents de la circulation impliquant un véhicule terrestre à moteur, en instaurant un droit à indemnisation quasi-automatique pour les piétons, cyclistes et passagers, qui sont considérés comme les victimes dites "non-conductrices". Cette protection repose sur plusieurs principes fondamentaux :
- Indemnisation automatique des victimes non conductrices : Les piétons renversés par une voiture bénéficient d’un droit à réparation intégrale pour les dommages corporels subis, sauf s’il est démontré qu’ils ont commis une faute inexcusable, cause exclusive de l’accident.
- Exclusion de responsabilité pour les enfants de moins de 16 ans et les personnes âgées de plus de 70 ans : Ces catégories bénéficient d’une protection renforcée, et leur éventuelle faute ne peut pas leur être opposée, sauf en cas de recherche volontaire du dommage.
- Obligation pour l’assureur du véhicule impliqué : L’assureur du véhicule responsable doit présenter une offre d’indemnisation dans un délai précis, en vertu des articles L. 211-9 à L. 211-25 du Code des assurances, afin de garantir une indemnisation rapide et équitable des victimes.
2. Responsabilité du conducteur et faute du piéton
2.1. La responsabilité du conducteur
Le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur est soumis à une responsabilité lourde en cas d’accident de la route impliquant un piéton. En vertu de la loi Badinter, il est tenu à indemnisation de la victime, indépendamment de toute faute de sa part. Toutefois, lorsque le piéton est lui-même à l’origine de l’accident, la question de sa faute peut être examinée.
2.2. La faute du piéton
Bien que la loi protège les piétons, une faute imputable à ces derniers peut limiter ou exclure leur droit à indemnisation. Par exemple, traverser hors du passage piéton protégé ou de manière imprévisible peut être considéré comme une faute. Dans plusieurs décisions, la Cour de cassation a jugé que la faute du piéton peut réduire ou exclure son droit à réparation si elle constitue la cause exclusive de l’accident.
3. Les recours possibles pour le conducteur victime
Dans certains cas, le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, lui-même victime d’un préjudice causé par un piéton, peut engager un recours pour obtenir réparation. Ce recours ne relève pas de la loi du 5 juillet 1985, mais du droit commun de la responsabilité civile prévu aux articles 1240 et suivants du Code civil (anciennement articles 1382 et suivants). Ainsi, un conducteur peut demander réparation si le comportement fautif du piéton a directement causé un dommage matériel ou corporel.
4. La procédure d’indemnisation
Pour garantir une indemnisation rapide, la loi prévoit une procédure stricte à laquelle les assureurs doivent se conformer. Voici les principales étapes :
- Déclaration de l’accident : La victime doit déclarer l’accident de la route dans les 5 jours à l’assureur du véhicule impliqué.
- Expertise médicale : Afin d'évaluer l'étendue du préjudice, un médecin expert examine la victime d'un accident de la route et son dossier médical et rend un rapport d'expertise. Il est vivement conseillé de s'adjoindre les services d'un médecin conseil de victime pour assister la victime lors de l'expertise. Lorsque le rapport d'expertise amiable n'est pas satisfaisant, il est possible de demander une expertise judiciaire.
- Offre d’indemnisation : L’assureur est tenu de formuler une offre d’indemnisation dans un délai de 3 mois à compter de la demande de la victime. Si l'état de la victime n'est pas consolidé, cette offre peut être provisionnelle.
- Acceptation ou négociation : La victime peut accepter, refuser ou négocier avec l'aide d'un avocat en droit du dommage corporel l’offre présentée par l'assurance. Soit la négociation aboutit à une solution amiable, soit, en cas de désaccord persistant, la victime peut saisir le juge compétent.
- Sanctions en cas de retard : Si l’assurance ne respecte pas les délais, des intérêts majorés peuvent être appliqués au montant de l’indemnisation.
5. Les cas particuliers : force majeure et fait d’un tiers
Dans de rares cas, le conducteur peut être totalement exonéré de sa responsabilité en cas de force majeure ou de fait d’un tiers. Par exemple, si un piéton est renversé à la suite d’un événement imprévisible et irrésistible (comme une catastrophe naturelle), le conducteur peut ne pas être tenu responsable.
Conclusion
Les accidents impliquant un piéton et un véhicule terrestre à moteur sont régis par un cadre juridique spécifique qui vise à protéger les victimes tout en encadrant les responsabilités. La loi Badinter constitue une avancée majeure en matière d’indemnisation, en facilitant et en accélérant les démarches pour les victimes. Toutefois, des nuances importantes subsistent, notamment en cas de faute du piéton ou de circonstances exceptionnelles. Si vous avez été victime, ou si l’un de vos proches a été renversé par une voiture, il est vivement recommandé de consulter un avocat en droit du dommage corporel afin de faire valoir vos droits et garantir une indemnisation juste et complète.
FAQ :
Qui est en tort quand on renverse un piéton ?
Sauf de rares exceptions, l’indemnisation du dommage corporel subi par le piéton renversé par un véhicule revient au conducteur du véhicule impliqué et in fine à son assureur. La question des fautes commises par le piéton comme par le conducteur du véhicule ne détermine que le responsable des dommages matériels occasionnées par l’accident.
Qui est en tort si un piéton traverse au rouge ?
Si un piéton traverse la rue lorsque le feu est au rouge, il commet une contravention au code de la route. Toutefois, s’il est heurté par une voiture, le conducteur et son assureur de celle-ci sera tenu à indemnisation des dommages corporels subis par le piéton victime.
Qui paye en cas d'accident corporel ?
En cas d’accident corporel de la route, l’indemnisation de la victime est assurée par l’assurance du conducteur du véhicule impliqué. S’il n’est pas assuré ou s'il est inconnu (délit de fuite) la victime peut obtenir son indemnisation en saisissant le Fonds de Garantie des Assurances Obligatoires (FGAO).
Quels sont les délais pour demander une indemnisation ?
Piéton victime d'un accident de la route, l'assurance du conducteur du véhicule impliqué est tenue de vous présenter une offre d'indemnisation dans un délai de 8 mois à compter de l'accident ou de 3 mois à compter de votre demande d'indemnisation. La durée réelle de l'indemnisation dépend toujours de l'étendues des dommages corporels. Plus les conséquences corporelles de l'accident sont graves, plus l'indemnisation définitive sera longue. En effet, l'indemnisation ne peut être intégralement évaluée qu'après la consolidation de l'état de la victime qui peut parfois prendre plusieurs mois voire plusieurs années. A noter qu'en l'absence de consolidation dans un délai de 3 mois suivant l'accident, l'assurance doit présenter une offre d'indemnisation provisionnelle (à valoir sur l'indemnisation définitive).
Quelle peine pour un homicide involontaire ?
Le délit d’homicide involontaire est puni par le code pénal d’une peine de 3 ans d’emprisonnement et 45.000 € d’amende. Les peines peuvent être portées jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 75.000 € d’amende lorsqu’une circonstance aggravante est retenues (ivresse, stupéfiant, défaut de permis, délit de fuite…)
Faut-il prendre un avocat en droit du dommage corporel après un accident de la route ?
Cela n'est pas obligatoire tant que dure la phase amiable avec l'assurance. Toutefois, cela toujours dans l'intérêt de la victime. En effet, le montant proposé par les assureurs sont très souvent bien inférieurs à l'indemnisation de l'entier préjudice subi par la victime. L'avocat en droit du dommage corporel pourra faire valoir tous les éléments du préjudice pour obtenir une indemnisation supérieure au montant obtenu par la victime seule face l'assurance.
En cas d'échec de la phase amiable, un avocat est obligatoire pour saisir le tribunal.